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Portrait de leader

Une humble héroïne

Michèle Chabot
Michèle Chabot
Photo : Michel Caron

14 août 2008

Karine Bellerive

L'apparence délicate et la discrétion de Michèle Chabot dissimulent un aplomb et un sang-froid hors du commun. Projetée dans une situation d'urgence, cette technicienne en administration au Service des ressources humaines et financières de l'Université de Sherbrooke a, sans aucune hésitation, pris les rênes d'une opération de sauvetage qui lui a permis de sauver une vie.

C'est à la toute fin d'un voyage en Tunisie effectué au printemps avec son conjoint, Gilles Godin, coordonnateur des activités étudiantes à l'UdeS, que le tempérament de leader de Michèle Chabot s'est pleinement révélé. Un midi, alors qu'ils flânaient sur une plage de la ville de Hammamet, ils ont assisté à une noyade. «C'était une journée où les vagues étaient très prononcées; il ventait beaucoup, raconte-t-elle. Il n'y avait que six ou sept personnes sur la plage. On regardait un homme et une femme d'une soixantaine d'années s'amuser dans l'eau. À un certain moment, on a perdu l'homme de vue.» Ils le cherchaient des yeux lorsqu'ils ont vu un jeune homme traîner un corps ensanglanté et inanimé sur le sable, puis commencer à pratiquer le bouche-à-bouche.

Concentration, tact et fermeté

Titulaire d'une formation de secourisme en milieu de travail, Michèle Chabot s'est immédiatement précipitée pour lui prêter main-forte. «Je me suis dit : «J'ai mon cours, il faut que j'y aille». Pendant un instant, j'ai espéré que quelqu'un arrive pour prendre la relève en disant : «Je suis médecin», mais ce n'est pas ce qui s'est passé...» Voyant que la respiration artificielle ne donnait aucun résultat et sentant que le sauveteur improvisé devenait de plus en plus nerveux, elle a pris la délicate situation en main. «La victime, un touriste français de 65 ans, avait les poumons plein d'eau, explique-elle. L'air ne passait pas du tout. Son visage était mauve et son torse devenait bleu.»

Michèle Chabot a donc orchestré les manoeuvres de réanimation jusqu'à l'arrivée des ambulanciers, 10 longues minutes plus tard. «J'étais dans ma bulle, relate-t-elle. Je savais que je devais me concentrer sur ce que j'avais à faire.» Après avoir demandé aux gens sur la plage d'appeler une ambulance, elle a dû faire preuve à la fois de tact et de fermeté pour que le jeune homme se ressaisisse et qu'ils puissent travailler ensemble. La charpente du sexagénaire lui a suggéré qu'il devait être un ancien athlète. Toute menue, Michèle Chabot a dû investir tout son poids pour exécuter le massage cardiaque. Après trois séquences, la victime a commencé à recracher l'eau avalée. «Je n'ai jamais été aussi contente de voir quelqu'un respirer, dit-elle, la voix transformée par l'émotion. J'étais tellement heureuse de sentir ma main monter et descendre sur son ventre!»

Le Parisien, avec qui elle correspond désormais, a donc eu la vie sauve grâce au calme, au courage, à la confiance en soi et à la grande humanité de Michèle Chabot. «C'était très émouvant, confie-t-elle. Mais ça m'a pris quelque temps avant de conscientiser l'ampleur de l'événement. Le matin de mon départ de Tunisie, je suis retournée sur les lieux et j'ai senti qu'une partie de mon coeur resterait toujours sur cette plage d'Hammamet.»

Il en est de même pour celui qui était à deux doigts d'y laisser sa peau, le jour même où il fêtait ses 65 ans. Michèle Chabot souligne d'ailleurs une étrange coïncidence puisque c'était aussi pour célébrer son anniversaire de naissance qu'elle se trouvait en Tunisie. «Je ne sais pas du tout pourquoi j'ai choisi ce pays, dit-elle. Il n'y a pas de hasard, je crois...»

Empathie et écoute

L'humble héroïne n'attend pas, cependant, que des incidents dramatiques se produisent pour faire preuve d'empathie. Ses compagnons de travail n'ont en effet que de bons mots à son égard. Ils affirment entre autres qu'elle ne se fait pas prier pour aider une collègue submergée par le boulot ou pour s'impliquer dans l'organisation d'une activité sociale. «Je m'en rends compte rapidement quand quelqu'un ne se sent pas bien, souligne Michèle Chabot. J'ouvre donc ma porte, sans être indiscrète. C'est important d'être à l'écoute. Ça permet de travailler dans une bonne ambiance et d'avoir du plaisir.»

Reconnue pour sa minutie, sa rigueur et son efficacité, la technicienne en administration veille scrupuleusement à bien informer les membres du personnel au sujet des avantages que leur confèrent le régime de retraite et l'assurance collective. Michèle Chabot affirme que plusieurs employés de l'UdeS ne connaissent pas bien les modalités de ces avantages sociaux. «On peut expliquer à trois personnes la même chose de trois façons différentes, note la diplômée de l'UdeS en administration des affaires et en psychologie des relations humaines. Mon travail, c'est de m'assurer qu'elles comprennent bien afin qu'elles puissent prendre les meilleures décisions en tenant compte de leur propre situation.»

Selon elle, ce souci du détail lui permet d'avancer et de performer. «Pour moi, faire preuve de leadership, ça veut dire en faire toujours un peu plus que ce qui nous est demandé, précise Michèle Chabot. À ce moment-là, on peut être pleinement satisfait de ce que nous avons donné parce qu'on est allé plus loin.» Par ailleurs, rien ne s'accomplit complètement en solo : le travail d'équipe est primordial lorsqu'il s'agit des ressources humaines. «On a régulièrement besoin des autres services, note-t-elle. C'est intéressant de faire affaire avec plusieurs personnes.»

Mère de deux magnifiques jeunes filles, Sabrina (18 ans) et Maude (15 ans), Michèle Chabot prend soin d'appliquer sa philosophie altruiste dans sa vie personnelle. «La communication va bien, c'est agréable. Nous avons une très belle relation», conclut-elle, les yeux remplis de fierté.